samedi 26 juin 2010

Réception du 09 juin 2010


à l'Académie Mallarmé

Monsieur le Président, chers poètes, chers amis,

Mon étonnement est toujours aussi vif depuis que j'ai appris la nouvelle de mon élection dans cette noble assemblée.

Une académie, ce n'est pas rien, mais une académie de poètes, quelle plus belle récompense peut demander celui qui fait des vers?

Jean Cocteau disait que l'Académie Mallarmé était "une académie, certes, mais de rêve". Nous sommes en effet ici dans un pays onirique; moi-même je ne suis pas sûr de ne pas rêver.

Guillevic me demandait quelque jour, à quatre vingt ans passés, et avec toutes les consécrations reçues, s'il était vraiment poète. Malgré la malice que je pouvais lire dans ses yeux, il me semble qu'il était sincère. La qualité de poète ne peut être donnée que par les autres poètes. C'est pourquoi je suis d'autant plus honoré et ému de votre choix.

Et pour moi, cette académie a de fortes résonances. En effet, je crois bien que plus que Baudelaire, Verlaine ou Rimbaud, le poète de l'Après-midi d'un faune a été mon modèle. Chez lui m'attiraient sa vocation entière et puissante à la poésie en même temps que son souhait de vivre d'un métier; et quand ce métier fut d'être professeur d'anglais, métier que j'exerçais un temps, vous comprendrez pourquoi j'ai une estime particulière pour cet homme et ce poète. Ces vers sont souvent difficiles, et ils me plaisent précisément par là: tant qu'à faire de la poésie, l'art le plus consommé de la littérature, autant le faire de la façon la plus absolue qui soit. Et j'ai longtemps rêvé aux mardis de la rue de Rome.

Et c'est dans une rue similaire qu'un jour me vint une révélation. Tandis que je voulais faire relier quelques volumes précieux de Guillevic, l'ouvrier m'informe qu'il tient là une caisse de livres envoyées par Guillevic, précisément. Étonnement, questionnement. Il s'agissait de la fondation de la bibliothèque de la maisons de Valvins. J'appris ensuite que Guillevic était Président de cette Académie.

De même qu'on retient ensemble les pages d'un livre grâce à la reliure, je reliais, moi aussi dans mon espace mental deux poètes qui pourtant apparemment n'étaient pas faits pour se rencontrer. Mais c'était sans compte la force de la poésie qui accepte en son sein toutes les inspirations, et sans compter aussi les poètes qui lisent la poésie.

Les quelques recherches que j'ai entreprises depuis m'ont confirmé dans les idées qui pouvaient réunir les deux maîtres: la précision poétique, l'attention sociale et le dévouement pour les autres poètes, tant à leur vie matérielle qu'à leur œuvre.

Je voudrais saluer un autre poète qui a fait la renommée de cette institution, premier prix Mallarmé en 1938. Il s'agit d'Audiberti, conforme à cette définition "poète des questions/ originelles défiant/ l'arche des voix" du Président Lionel Ray, dans Partout ici même, Gallimard, en 1978, p. 161. Mon épouse a travaillé vingt ans sur l'œuvre d'Audiberti, je crois qu'elle serait particulièrement fière de me voir lui emboîter le pas, en quelque sorte. Et c'est pour moi une occasion de lui rendre hommage.

Aujourd'hui cette Académie vit encore et elle m'accueille en son sein; je ne peux que balbutier de pauvres remerciements envers son Président, Lionel Ray et envers toute l'assemblée.

Emission de radio, « l’Invité du mois », avec Eric Cassar, sur la radio associative,

Radio Valois Multien, à Crépy en Valois,

enregistrée le 25 juin 2010 et

diffusée en juillet 2010 ( le 1 à 11h, le 16 à 17 h, le 25 à 16 h; le 31 à 13 h),


à télécharger sur le site de la radio : RVMFM.

Bernard Fournier a répondu aux questions d'Eric Sivry.